Salariés et salariées de Fralib à Gémenos. Une anthropologie des subjectivités ouvrières – Florent Berlioux, 20 décembre 2018

Thèse soutenue le 20 décembre 2018 à l’EHESS Marseille sous la direction de Jean Boutier, directeur d’études à l’EHESS et Valeria Siniscalchi, directrice d’études à l’EHESS.

Titre
Salariés et salariées de Fralib à Gémenos. Une anthropologie des subjectivités ouvrières (vers 1980-2014)

Résumé
De 2010 à 2014, l’usine de conditionnement de thés et d’infusions Fralib, près de Marseille, est le théâtre d’une lutte ouvrière parmi les plus importantes de ces trois dernières décennies. Engagé-e-s sur le terrain syndical, politique et judiciaire contre une grande multinationale de l’agroalimentaire, les salarié-e-s combattent la délocalisation de leur usine en Pologne. Ils/elles ambitionnent de se réapproprier les outils de production et construire une coopérative porteuse d’engagements sociaux et environnementaux. Des luttes similaires d’« usines récupérées » se sont multipliées ces deux dernières décennies s’inspirant des premières expériences de récupération en Argentine. Ces mobilisations ouvrières proposent des formes de résistances originales à la déterritorialisation d’une économie capitaliste mondialisées mettant les travailleur-se-s de différents pays en concurrence, tout en les éloignant des centres de décision. Dans un contexte d’invisibilité sociale et politique des mouvements ouvriers, ce travail enquête sur les subjectivités des acteur-rice-s de cette mobilisation présentée comme une lutte « pour la préservation de l’emploi ». La fermeture d’une usine n’est pas anticipée par les travailleur-se-s mais le « collectif des salariés » qui y fait face trouve ses fondements dans l’économie des relations sociales de l’atelier.
A partir d’un travail ethnographique, l’analyse restitue l’économie morale des travailleur-se-s de l’usine ces trente dernières années et étudie leur « capacité d’agir » (agency) dans un espace de dominations. Cette études se focalise sur l’hybridisation des acteur-rice-s de l’employé-e-s au coopérateur-rice-s au travers d’une lutte sociale, économique, politique et culturelle. Par quels processus les salarié-e-s d’une usine en viennent à revendiquer sa propriété ? Comment les ouvrier-ère-s passent des résistances individuelles et collectives en production à la constitution d’un acteur politique ? Comment se positionnent-ils/elles vis-à-vis de l’histoire des mouvements ouvriers auparavant au cœur de la vie politique et aujourd’hui marginalisés ? Quels sont les rapport des individus avec la « classe » et ses institutions représentatives ?

Title
Men and Women of Fralib in Gémenos. An anthropology of workers subjectivites (circa 1980-2014)

Résumé
From 2010 to 2014, Fralib tea and herbals processing factory, near Marseille in France, was the arena of one of the most important worker’s struggle within the last three decades. The employees are engaged in a fight against a big food multinational company throughout the politicial, the judicial and the union fields, and against the relocation of the factory in Poland. They reclaim the machines to build a cooperative carrying social and environmental values. Such « recovering factory » struggle multiplied last two decades from the argentine’s primal experiences. These workers mobilizations are original forms of resistances against the deterritorialization of a globalising capitalist ecnonomy that makes them compete from a country to another, while keeping them away from decision-making centers.In a context marked by a political and social marginalisation of the labour mouvements, this study investigate the subjectivities of the actors and the actresses of this struggle who present it as a fight for keeping employments. The closure of a factory is not expected by the workers, but the « workers’ collective » that faces it, takes root into the previous social relationships in the workshop. Based on a ethnographic fieldwork, the analysis shows the workers moral economy in the factory the last thirty years and their agency in a space of dominations. This study focuses on the hybridization of the actors and actresses from employees to cooperators all along a social, economical, political and cultural fight. Through what processes the workers of a factory come to a claim of the property ? How the workers shift from individual and collective resistances in production to a political agent ? How do they take a stand on the labour movements history previously unavoidable on the political life but now marginalized ? How do they take a stand on the « working class » and it representative institutions ?

Jury
Jean Boutier (Directeur de thèse), EHESS
Valeria Siniscalchi (Codirectrice), EHESS
Anne Bory, Université Lille 1
Pierre Fournier, Aix-Marseille Université
Krista Harper, University of Massachussets
Stefano Musso, Universita degli Studi di Torino

École doctorale
EHESS – Formation doctorale « Sciences sociales – Marseille » (École doctorale 286)
Spécialité : anthropologie sociale et ethnologie