La journée d’étude « Excellence partout, justice quelque part ? Diffusion des logiques de classement, inégalités sociales et production des élites » aura lieu le 16 juin (9h00-18h00), sur le site Pouchet du CNRS (Paris 17e), en salle de conférence.

Visioconférence
Pour obtenir le lien de connexion, merci d’écrire à charles.bosvieux-onyekwelu@cnrs.fr

Coordination scientifique
Caroline Bertron et Charles Bosvieux-Onyekwelu, avec le soutien du RT 42 (« sociologie des élites ») de l’Association française de sociologie, du CRESPPA-CSU (UMR 7217) et du Centre Norbert Elias (UMR 8562).

 

Programme


 

9h00
Accueil des participants et participantes

9h15
Ouverture
Winning in the Winner-Take-All Attention Economy: How Elite Content Creators Redefine Excellence
Ashley Mears (Boston University)

 

10h00-11h45
Sous l’excellence, des rapports sociaux de classe, de genre et de race

Discutant : Wilfried Lignier (CNRS – CESSP)

Aux origines de « l’esprit de l’alpinisme » : la construction de l’excellence dans un club de gentlemen socialement fermé
Delphine Moraldo (Centre Max Weber)

 

L’envers des minorités modèles : excellence et mécanisme de racialisation à l’égard des Asiatiques
Ya-Han Chuang (CERI – Sciences Po)

 

Pourquoi une présence au bureau de quinze heures par jour ? Rapports au temps et genre dans la haute fonction publique
Elsa Favier (Centre d’études de l’emploi et du travail)

 

13h15-15h00 – La construction paradoxale d’une égalité des chances par la distinction

Discutant : Adrien Delespierre (INSERM – Observatoire régional de la santé)

Des « parcours d’excellence » en éducation prioritaire ? Une nouvelle entrée pour les politiques d’égalité des chances
Renaud Cornand (MESOPOLHIS) & Ariane Richard-Bossez (Aix-Marseille Université – MESOPOLHIS)

 

Des « plus fragiles » aux « excellent·es » : adaptations stratégiques et résistances au sein du dispositif de mentorat de l’association Afev
Emily Lopez-Puyol (Aix-Marseille Université – ADEF)

 

Du stylo aux crampons : excellence sportive et exemplarité scolaire dans la formation des footballeurs en France et en Allemagne
Yacine Amenna (EHESS – Centre Norbert Elias)

 

15h30-17h15 – Les hiérarchies professionnelles de l’excellence

Discutante : Isabel Boni-Le Goff (Université Paris 8 – CRESPPA-CSU)

L’excellence hors et contre l’institution scolaire ? Apprentissage compagnonnique, élite du métier et stratégie de distinction
Ugo Palheta (Université de Lille – CRESPPA-CSU)

 

À l’ombre des classements : concours professionnels, carrières et production des « meilleurs ouvriers de France » dans le monde des pâtissiers
Thomas Collas (Université de Strasbourg – SAGE)

 

La danse, la science et la finance : trois registres de mise au travail par “l’excellence”
Joël Laillier (Université d’Orléans – Centre Maurice Halbwachs)

 

17h15. Clôture
Pourquoi encore parler d’excellence ?
Annabelle Allouch (Université de Picardie Jules Verne – CURAPP-ESS)

 

 

Argumentaire


 

Terme aujourd’hui consacré des politiques et des jugements scolaires (Bongrand, 2011 ; Boulin, 2013 ; Cornand et al., 2021), « l’excellence » est également de plus en plus présente dans une multitude de secteurs et de domaines de la vie sociale. La notion évoque en effet d’abord l’évaluation, les procédures et les normes par lesquelles l’école érige des hiérarchies et confèrent des qualités aux individus. Mais si l’idée d’excellence doit être rapportée aux modes de classement de l’institution scolaire, ce que réaffirment les travaux récents sur la fabrique de l’excellence, y compris aux marges de l’école (Bertrand et al., 2016), il importe également d’analyser l’implicite qui accompagne cette idéologie, à commencer par la croyance selon laquelle le but de l’éducation serait de faire ressortir des meilleur·es et de distinguer celles et ceux qui réussissent mieux. Cette croyance n’est pas sans effets sur le monde social au sens où, en produisant de « l’excellence » et des « excellents », l’institution scolaire « fabrique alors une réalité nouvelle » et « produit sur les élèves une série de jugements qui donnent aux inégalités réelles une signification, une importance et des conséquences qu’elles n’auraient pas en l’absence d’évaluation » (Perrenoud, 2010, p. 15).

Dans des secteurs comme la recherche, l’avocature, la haute fonction publique, dans la gestion des politiques publiques, mais aussi dans certains secteurs industriels et commerciaux (l’industrie dite « de pointe », celle du luxe, la « haute gastronomie »), « l’excellence » est visée et promue ; elle est parfois même partie prenante d’un discours d’exaltation nationale. Il convient alors de saisir ce que ces productions de l’excellence en divers lieux révèlent de commun et de variable dans les modes de classement, les définitions et les effets sur les secteurs et les individus qu’elles classent. L’efficacité du recours à l’excellence ne tient pas aux solutions politiques que celle-ci est censée apporter mais bien d’abord aux mécaniques sociales à l’œuvre, aux idéologies et aux représentations que celles-ci façonnent, à l’évidence des classements qu’elles produisent et à leurs effets sociaux. Invoquée par femmes et hommes politiques, représentant·es du (grand et du petit) patronat, athlètes, artistes, célébrités, ou encore élites de l’artisanat et des métiers de bouche pour marquer la valeur sociale individuelle, « l’excellence » –  sous toutes ses formes – renvoie ainsi à des questions fondatrices de la sociologie et de la sociologie des élites. On ne saurait pour autant voir dans « l’excellence des classements » une logique implacable. Les jugements par l’excellence, comme ceux sur le mérite (Allouch, 2021), ne s’imposent ni sans résistances ou alternatives, ni uniformément et universellement dans l’espace scolaire et social. Ce sont ces différents questionnements que la journée d’études permettra d’explorer.

« L’excellence » au-delà de l’école

Au-delà de sa signification dans l’univers scolaire, la notion d’excellence constitue parfois un élément à part entière des instances de certification et de formation dès lors que celles-ci mettent l’accent sur l’apprentissage, sur l’ascèse et sur leurs aspects distinctifs. C’est par exemple ce que l’on trouve dans le discours des ordres professionnels, des corporations ou du compagnonnage, où l’acquisition d’un métier se combine avec une injonction à l’excellence fondée sur les valeurs et la promotion de compétences professionnelles spécifiques. La morale compagnonnique fait par exemple ressortir un méritocratisme et un volontarisme s’affirmant dans « le désir de “mobiliser les énergies” autour d’idéaux d’accomplissement professionnel, de responsabilité individuelle et de dépassement de soi » (Palheta, 2010, p. 64), qui renvoient, chez les apprenti·es, à une volonté de «  s’extraire ou ne pas tomber au sein du prolétariat – d’usine, de chantier, d’atelier » (ibid., p. 58). On décèle alors dans ces voies de formation alternatives à la forme scolaire traditionnelle et politiquement valorisées la recherche d’un sentiment d’élection permettant d’échapper à des destins sociaux appréhendés comme repoussoirs. On voit également en quoi, pour être produite, transmise ou octroyée, « l’excellence » ne semble pouvoir se passer d’une intervention formelle, d’institutions et de socialisation institutionnelle (Lignier et Pasquali, 2016).

À la fois résultante officielle des verdicts de l’institution scolaire et promesse de réalisation de soi (Khan, 2011), « l’excellence » passe par une course aux classements, prix et distinctions dans des univers sociaux très divers : ceux des « meilleurs ouvriers » de France, ou encore, dans le secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche, ceux des « initiatives d’excellence » (IdEX, LabEX et ÉquipEX). Associée aux « talents » et à la « performance », « l’excellence » peut être abordée comme l’un des aspects centraux de l’idéologie méritocratique telle qu’elle est promue aujourd’hui, dans son versant institutionnel, et souvent, quoique non exclusivement, étatique. Là où le mérite s’impose, dans le sens commun, comme croyance qui appelle un sens de la justice, comme morale du travail et comme « morale d’État » (Allouch, 2021, p. 41), et là où la « qualité » (dans l’univers de la recherche par exemple) fait intervenir « une pluralité de critères […] et des jugements soumis à l’épreuve du temps », l’excellence, elle, distingue de manière « univoque et indiscutable » (Karpik, 2012, p. 120), sur une logique d’exception et d’élection en partie héritée de la définition moderne et prérévolutionnaire de l’élite en France (Dudouet, 2018), et dont témoigne par exemple la place de la « réussite » individuelle aux États-Unis (Mills, 1956, p. 303). Les représentations du monde social véhiculées par ces différentes notions ne se recoupent donc pas complètement et plusieurs « modèles » historiques d’excellence méritent d’être distingués. Mais ce sont néanmoins la perception de toute la structure sociale et la structure des inégalités qui sont emportées lorsque l’on constate que les filières les moins valorisées du système scolaire telles l’enseignement professionnel sont décrites, par le pouvoir politique, comme des voies « d’excellence ». En somme, l’idéologie de l’excellence, sous ses déclinaisons multiples, tend à se diffuser dans les différents groupes sociaux, dans les rapports à l’école et dans le monde du travail par exemple, au point de venir naturaliser des différences sociales très variées. En revendiquant le fait que le discours par lequel les élites se légitiment est le discours par lequel tient tout l’ordre social, l’idéologie de l’excellence renvoie à des tendances unificatrices à l’œuvre dans différents univers qui ne sont pas strictement professionnels : « La rhétorique de l’excellence pénètre dans les salles de classe et les entreprises, mais elle s’immisce aussi dans les services publics et jusque dans nos vies intimes, comme si nous devions sans cesse nous montrer à la fois performants et méritants » (Pasquali, 2021, p. 271).

Excellence et naturalisation des inégalités sociales

En ce qu’elle distingue des bon·nes et des moins bon·nes, des lauréat·es et des recalé·es, l’excellence, par principe, ne peut pas être pour tout le monde : comme l’écrit l’historien de l’éducation Antoine Prost, « il faut que certains échouent pour que la qualité des autres soit reconnue » (Prost, 2013, p. 18). Si elle est, en France, particulièrement symbolisée par le mythe du concours (Allouch, 2017), cette pratique peut être vue comme consubstantielle à toute organisation au sens où tout groupe social, toute corporation professionnelle, sportive ou artistique et même toute pratique engendre des normes d’excellence : « Lorsque plusieurs personnes se livrent à la même activité, sont confrontées à la même tâche, les unes paraissent s’en tirer mieux que les autres, qu’il s’agisse de conduire, de danser, de jouer aux cartes, de cuisiner, de raconter une histoire, d’élever un enfant ou d’animer une soirée » (Perrenoud, 2010, p. 12). En d’autres termes, comme principe opératoire de différenciation sociale, la mécanique de l’excellence vient séparer celles et ceux qui se distinguent de celles et ceux qui rentrent dans le rang. Dans le champ scientifique et dans la sociologie des réputations, cette opération de tri s’exprime par le concept de visibility, qui « exprime la valeur différentielle, distinctive, de cette espèce particulière de capital social : accumuler du capital, c’est “se faire un nom”, un nom propre (et, pour certains, un prénom), un nom connu et reconnu, marque qui distingue d’emblée son porteur, l’arrachant comme forme visible au fond indifférencié, inaperçu, obscur, dans lequel se perd le commun (de là sans doute l’importance des métaphores perceptives, dont l’opposition entre brillant et obscur est le paradigme, dans la plupart des taxinomies scolaires) » (Bourdieu, 1976, p. 93). La reconnaissance de l’excellence suppose donc une élection et une vocation qui ont pour conséquence de reprendre à nouveaux frais notre compréhension de la supériorité sociale (Menger, 2004 & 2009 ; Schotté, 2013) : avec l’excellence, peuvent tout autant être mis en avant l’éducation, le mérite et le travail que le talent ou l’exceptionnalité individuelle. En somme, est excellent·e non pas celle ou celui qui essaie, mais celle ou celui qui réussit, de sorte que le phénomène élitaire ainsi décrit ne procède pas seulement d’une position occupée dans l’espace social, mais aussi d’une forme bien spécifique de valorisation du mérite (ce qu’on appelle couramment « l’élitisme »).

Le rôle de « l’excellence » dans la production des rapports sociaux de classe, de genre et de race

Traiter de l’excellence comme d’une idéologie, au double sens d’un « ensemble de représentations ou de discours destinés à légitimer les rapports de pouvoir » (Hauchecorne, 2020, p. 433) et d’un « produit de stratégie d’universalisation » (Bourdieu, 2016, p. 1057), suppose d’analyser la manière dont cette idéologie se diffuse au regard de l’organisation de la société en classes et des hiérarchies qui la composent. Il importe ainsi de considérer les processus d’altérisation, mais aussi les manières par lesquelles les figures qui incarnent l’excellence reproduisent des rapports sociaux de domination, notamment des rapports sociaux de genre et de race. D’une part, « compétition, excellence, sélection, exaltation des “leaders” ou des “champions”, tout ce vocabulaire à la fois sportif, néo-libéral et néo-darwinien » (Charle, 2006, p. 13) s’appuie bien souvent sur la mise en scène de role-models masculins et blancs qui incarnent la réussite sociale (en France : Bernard Arnault, François Pinault ; aux États-Unis : Mark Zuckerberg, etc.). Sont par exemple peu interrogées, dans les canaux qui participent de cette glorification, les conditions qui font que les hommes peuvent, plus facilement que les femmes, se conformer aux normes d’engagement intensif au travail (Gadéa & Marry, 2000 ; Laillier & Stenger, 2017) auxquelles la vocation de « l’excellence » est généralement associée. D’autre part, la problématique « se distinguer/rentrer dans le rang » se pose avec une particulière acuité pour les groupes sociaux dits « minoritaires » et pour les personnes racisées, et plus largement dès lors qu’on pense les logiques distinctives à l’intérieur des rapports sociaux de domination (Pasquali, 2014, p. 143-147). À la fin du XIXe siècle, Durkheim notait déjà que « pour justifier la tolérance, toujours précaire, qui leur est accordée, les minorités sont tenues à plus de moralité » (Durkheim, 1895, p. 156-157). Appelées à se placer dans le sillage de la « minorité du meilleur » (Elias & Scotson, 1965, p. 29), les personnes racisées sont tenues d’adopter, avec zèle et discrétion à la fois, les valeurs les plus positivement revendiquées par les groupes sociaux dominants. Certains travaux mettent en évidence comment les figures de personnes immigrées et descendantes d’immigré·es sont, parmi les élites politiques et économiques, à la fois racisées et minorisées mais aussi promues par des parcours qui les conforment aux normes d’excellence des groupes majoritaires (Avanza, 2010). Ainsi, les discours politiques et médiatiques valorisant l’image monolithique d’une « minorité modèle » peuvent tendre à « renforcer la hiérarchisation raciale » et à enfermer « dans une représentation figée de personne immigrée qui “réussit” » (Chuang, 2021, p. 12). Les dispositifs d’excellence en éducation prioritaire comme les « cordées de la réussite » ou les conventions d’éducation prioritaires à Sciences Po reproduisent, en tant que politiques scolaires de « ciblage », des normes d’excellence en s’appuyant sur la réussite de quelques-un·es (Allouch, 2022 ; Nozarian, 2013), en visibilisant les parcours des élèves racisé·es et descendant·es d’immigré·es. Se pose alors la question de la possibilité réelle d’une définition minoritaire de l’excellence, en dehors des effets d’assignation conduisant les catégories minorisées et racisées à une place de « Blancs honoraires » (Bonilla Silva et Embrick, 2005).

Pratiques et critiques de la « société de l’excellence »

L’excellence a ses rétributions, que ce soit en positions publiques, en argent, en titres et en décorations. Historiquement, la mise en place de ces récompenses était guidée par une disposition que les institutions d’État inculquaient et propageaient dans l’Europe libérale : « se mesurer les uns aux autres, se comparer pour se dépasser » (Ihl, 2007, p. 24). Si l’histoire de « l’émulation prémiale » (la compétition entre égaux pour les récompenses et les honneurs) raconte l’institutionnalisation d’une « technique de gestion des conduites » au sens foucaldien, sa banalisation et sa professionnalisation (que l’on pense par exemple aux distinctions du type « employé·e du mois ») l’ont aujourd’hui transformée « en une incessante entreprise de cotation sociale » : « À la fois hiérarchisée et fonctionnelle, cette technique dont l’État se porte garant s’est instituée en moyen de réglementer les formes de la grandeur sociale » (ibid., p. 28). Au cours du XXe siècle, en effet, les élites ont appris, avec la progression des idées démocratiques, à tirer leur supériorité sociale non plus seulement de la rente et du capital, mais aussi de leur travail et de leur investissement dans l’univers professionnel (Hugrée, Penissat & Spire, 2017, p. 171-175). De ce fait, elles tendent aujourd’hui de plus en plus à penser leurs positions sociales comme conquises et méritées, et à justifier leur « mérite » par leur « excellence ». C’était déjà le discours de justification qu’Émile Boutmy, le fondateur de l’École libre des sciences politiques, exposait en 1871 lorsqu’il déclarait : « Contraintes de subir le droit du plus nombreux, les classes qui se nomment elles-mêmes les classes élevées ne peuvent conserver leur hégémonie politique qu’en invoquant le droit du plus capable. Il faut que, derrière l’enceinte croulante de leurs prérogatives et de la tradition, le flot de la démocratie se heurte à un second rempart fait de mérites éclatants et utiles, de supériorité dont le prestige s’impose, de capacités dont on ne puisse pas se priver sans folie » (Boutmy, 1871, p. 15). Dans ce cadre, l’excellence devient comme un « droit à », proche du concept d’entitlement élaboré par Rachel Sherman dans son enquête sur les familles new-yorkaises richement dotées en revenus et en patrimoine (Sherman, 2017). Elle s’inscrit dans une logique de naturalisation de la domination sociale et économique, qui est en même temps une euphémisation des différences et inégalités de conditions de vie. Aussi peut-on se demander quel rôle la valorisation de la réussite joue dans l’imposition d’un modèle de société néolibérale quelque peu hybride, caractérisé par « une rhétorique managériale de l’excellence et de la performance individuelles qui se conjugue aujourd’hui avec les conceptions traditionnelles du mérite républicain » (Pasquali, 2021, p. 19).

On peut, dans ce prolongement et en termes plus politiques, s’intéresser aussi aux mouvements sociaux de lutte face aux politiques de l’excellence, dans la recherche par exemple, mais aussi aux résistances plus implicites aux normes de mise en concurrence, aux logiques de primes et de rétribution des meilleur·es (par exemple lors des moments d’exaltation nationale de l’excellence que sont les Jeux olympiques et leurs tableaux des médailles). On peut également observer la contestation, dans divers milieux professionnels, économiques et scolaires, des logiques de classement qui cherchent à s’imposer, dans ces secteurs, à l’occasion de réformes ou de changements organisationnels par exemple.

Pour décortiquer ces transformations, le RT « Sociologie des élites » de l’Association française de sociologie a jugé de bon de réunir différent·es spécialistes ayant été amené·es, par leurs travaux, à étudier cette promotion de l’excellence dans les mondes du travail, de l’artisanat, de la recherche, du sport ou encore de la haute fonction publique. L’objectif de cette journée d’études est ainsi de saisir, au-delà de la diversité des secteurs dans lesquels la référence à l’excellence peut être documentée, la manière dont cette idéologie sociale fait système.

 

Références


 

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