La mine, c’est-à-dire le vaste champ des exploitations minières et des phénomènes sociaux, économiques, politiques, culturels qui leur sont associés, constitue un objet scientifique large qui suscite ces dernières années un intérêt renouvelé de la part des sciences sociales. Mais, si différentes disciplines s’attachent à la mine, elles l’ont fait jusqu’à présent chacune de leur côté, avec des points de vue et des terrains assez différents. Cette fragmentation des études minières présente l’inconvénient de laisser persister des points aveugles et d’empêcher le renouvellement de toute une série de questionnements.

L’enjeu de ce séminaire, associant historiens et anthropologues, sera donc de mettre en œuvre un dialogue interdisciplinaire, mettant en perspective les périodes, les terrains et les cas, afin de proposer une approche politique des phénomènes miniers. Il s’agira en particulier, à travers le cas des mines, de s’interroger, à différentes échelles, sur les frontières qui séparent – ou parfois confondent – l’entreprise et l’institution publique et, plus largement, de se saisir du cas minier, dans toutes ses ambiguïtés, comme une manière de questionner la frontière public / privé à différentes époques et en divers lieux.

Trois grandes pistes d’investigation seront suivies à cet effet. On explorera la mine sous l’angle de la maîtrise des ressources et, de façon plus globale, comme élément disputé de la souveraineté politique des États (ici on s’intéressera aux nationalismes miniers, aux transnationales et aux mouvements autochtones). On se penchera simultanément sur la mine comme acteur politique local, comme entreprise ou institution inscrite dans un territoire localisé, susceptible d’agir et de peser, parfois de manière considérable, sur la vie sociale et politique de ce territoire (du paternalisme à la responsabilité sociale d’entreprise) au point d’en transformer parfois les rapports sociaux. La mine est vue ici comme lieu de souveraineté. La troisième piste consistera à analyser l’aspect inverse, et pourtant complémentaire, c’est-à-dire la mine comme enclave, comme lieu dérogatoire et exceptionnel, comme lieu de déconnexion relative du local (et de reconnexion à d’autres échelons), en s’attachant moins à l’aspect économique que social et politique de la question.

De manière transversale, il s’agira encore de se demander comment les relations de travail et le traitement d’une main d’œuvre – souvent étrangère – sur mine peut s’avérer paradigmatique ou non de la structuration à la fois des mondes ouvriers et des sociétés qui abritent ces entreprises, dans le cadre d’une tension entre relations sociales de production et de compensation.

Coordination scientifique
Christine Demmer, chargée de recherche au CNRS (CNE), Boris Deschanel, maître de conférences à l’Université d’Avignon (CNE), Marion Fontaine, maître de conférences à l’Université d’Avignon (CNE), Pierre-Yves Le Meur, directeur de recherches (IRD-GRED)

Les séances auront lieu le jeudi de 14h à 17h (EHESS-Marseille, Centre de la Vieille-Charité, 2 rue de la Charité 13002 Marseille) en salle A, les 6 février, 6 mars (exceptionnellement le vendredi), 26 mars, 2 avril, 7 mai, 4 juin, 18 juin.

Programme des séances

Jeudi 6 février
Introduction collective : Mines, nation et nationalisation

Vendredi 6 mars
Ariane Mak (Université Paris-Diderot)
Saisir les revendications salariales à travers une histoire du voisinage. Hiérarchie de statut, dépenses et ragots dans une bourgade minière en guerre (1942-1943).

Jeudi 26 mars
Francesca Sanna (Université Paris-Diderot)
Entre nationalisme des ressources et propaganda : l’autarcie fasciste et ses conséquences dans les mines italiennes de l’entre-deux-guerres.

Jeudi 2 avril
Thomas Le Roux (GRHEN – CNRS)
État, entreprise et citoyens face aux risques et aux nuisances minières. Une réflexion historique.

Jeudi 7 mai
Judith Hayem (Université de Lille)
Entre l’entreprise et l’État : SIDA, VIH et prise en charge des questions sanitaires dans les mines d’Afrique du Sud.

Jeudi 4 juin
Benjamin Rubbers (Université Libre de Bruxelles)
Syndicats et les micro-politiques du travail dans le contexte du boom minier au Congo et en Zambie.

Jeudi 18 juin
Carmen Salazar (CERMA – CNRS)
Titre à déterminer