Quentin Destieu soutient sa thèse en art et sciences de l’art préparée sous la direction de Jean-Paul Fourmentraux (Centre Norbert Elias/AMU) et d’Emmanuel Guez (directeur de l’Ecole Supérieure d’arts et de design d’Orléans), le 6 juillet 2020 à 13h30 à Aix-en-Provence. Une transmission en visio-conférence est prévue.

Titre
Art contemporain et nouvelles fabriques numériques

Résumé
Le projet de cette thèse est de dessiner les contours d’un mouvement artistique qui fait appel aux technologies digitales mais dont la qualification trop généraliste d’art numérique peine à circonscrire les questionnements et l’esthétique. Cette recherche s’appuie sur plus de dix ans de programmation artistique du festival des arts multimédia GAMERZ (Aix-en-Provence et Marseille) en tant que terrain d’observation et d’interaction avec ma pratique. La série d’analyses d’œuvres et d’entretiens d’artistes issue de cette sélection répond à la double nécessité de soumettre à l’histoire de l’art, des œuvres en lien tant avec l’actualité qu’avec le futur de nos sociétés, et de chercher à identifier quelles sont les références, les pratiques et les engagements qui les unissent. Loin d’être technophobes, les artistes associés à cette recherche s’approprient ces technologies et entrent en réaction avec certaines dérives orwelliennes de nos sociétés. L’analyse de leurs démarches permet de mettre en lumière des questionnements critiques propres à ce mouvement qui tend à s’émanciper du discours techno-libéral dominant.
La première partie s’attache à définir un corpus de références historiques et théoriques commun à un ensemble d’artistes partageant un système de valeurs et de pratiques numériques. Ces références se cristallisent autour de mouvements sociaux « techno-critiques » et de contre-cultures (New Age, punk, hippies, etc.) servant de substrat à des gestes artistiques emblématiques qui jouent avec les technologies et architecturent un mouvement cohérent. Le travail collectif, le partage de savoir-faire, l’émancipation par la pratique sont des principes défendus par ces artistes qui se juxtaposent à ceux portés par certaines contre-cultures numériques : mouvement hacker, Do it yourself, Open source. La deuxième partie révèle comment leurs pratiques participent avec ces mouvements à faire évoluer la notion d’atelier en véritable fabrique numérique qui partagent avec les Fablab, hackerspaces, et les Artlab des outils (imprimantes 3D, machines à commandes numériques, logiciels libres, cartes électroniques, etc.) et des méthodes de travail. Leurs volontés convergentes associées à celles des artistes concourent à la mise en place de systèmes plus autonomes comme alternatives citoyennes aux technologies dominantes. Ces artistes renouent ainsi à des engagements et des utopies propres à certaines avant-gardes plus anciennes, réactualisant des préoccupations du Situationnisme ou encore du mouvement Arts and Crafts. La troisième partie identifie des prospectives artistiques portées par ces créations. Elle établit que la volonté de compréhension de ces technologies, nourrie de savoir-faire technique et de pratique, cherche à intégrer et à revendiquer une « touche » humaine plus artisanale. Dans ce processus de création, certains artistes s’ouvrent à des méthodes, moins cartésiennes, en lien avec des rituels magiques. Ils éprouvent alors, parfois avec humour, la fragilité et la faillibilité des technologies dans leurs interactions avec l’invisible. Ces expérimentations trouvent leurs origines dans les contre-cultures New Age et des théories encore en développement comme celles de la physique quantique. Leurs œuvres nous offrent des respirations dans lesquelles l’imagination retrouve un rôle central, émancipant l’humain des rôles de consommateur et d’utilisateur en lui permettant de réaménager son propre imaginaire.

Mots clés
Art contemporain, Pratiques numériques, D.I.Y., Open source, Utopies, Contre-culture, Alternatives, Festival GAMERZ.

Jury
Cécile BABIOLE, artiste et enseignante à l’École nationale supérieure de création industrielle, Paris, examinatrice,
Jean-Paul FOURMENTRAUX, Professeur des universités en Esthétique et Socio-anthropologie des arts et media, Aix-Marseille Université et EHESS. directeur,
Emmanuel GUEZ, artiste et Directeur de l’Ecole Supérieure d’arts et de design d’Orléans, co-directeur.
Vincent RIOUX, artiste et enseignant à l’École nationale supérieure des beaux-arts, Paris, examinateur,
Alexandra SAEMMER, Professeur des universités en Sciences de l’information et de la communication, Paris 8, Université Vincennes Saint-Denis, rapporteur,
Yann TOMA, Professeur des universités en arts plastiques, Paris 1, Université Panthéon-Sorbonne, rapporteur.

Ecole doctorale
354 – Aix-Marseille Université